Le toucher, un sens essentiel chez l'Homme

Un sens en éveil dès les premiers instants

Le toucher est le premier sens à se développer chez l'homme. Alors que le fœtus de quelques semaines est encore sourd, aveugle et muet, il réagit déjà aux stimulations tactiles. Les cellules souches germinales qui donnent naissance à la peau sont les mêmes que celles qui donnent naissance au système nerveux. La peau peut ainsi être perçue comme la partie émergée de notre système nerveux.

Après la naissance et dans les premiers mois de la vie, la peau, l'ensemble de la surface du corps deviennent à la fois la frontière entre Moi et les autres et une source de plaisir au travers des actes de tétée, de succion, de caresses et de jeux. C'est la qualité de ces premiers contacts avec le corps de la mère tout d'abord, avec l'environnement familial puis scolaire et social qui détermine le sentiment de confiance en soi, la capacité à s'abandonner et se relâcher. Le toucher véhicule ainsi des sentiments premiers de sécurité, de confiance, d'abandon. Le massage permet d'installer ce sentiment de sécurité, cette sensation de bien-être à l'intérieur de notre corps. L'installer et en quelque sorte "l'enregistrer" à l'intérieur même des cellules de nos tissus conjonctifs.

Au travers du massage, et ce quelque soit l'âge de la personne massée, c'est la possibilité de renouer avec ce sentiment de confiance qui est offerte, voire de réparer ce qui n'a peut-être pas été reçu ou pas en abondance, de rééquilibrer et revaloriser l'image de soi, dans la relation masseur-massé. Sur l’importance du toucher dans le développement et même la survie de l’enfant, signalons les études et l’anecdote rapportées dans Touching : aux Etats-Unis, dans les années 1900-1920 les taux de mortalité infantile dans les orphelinats avoisinaient les 100%. Si bien que dans certains établissements dès leur admission, les enfants étaient systématiquement enregistrés avec une fiche portant à la rubrique "état de santé", la mention : "sans espoir".

Des effets positifs constatés et reconnus

En effet les bébés recevaient à cette époque nourriture et soins médicaux mais on considérait qu'il était inutile de les prendre dans les bras, qu'il fallait les laisser pleurer des heures durant, les nourrir à heure fixe (et parfois même leur attacher les bras sur les côtés pour éviter qu'ils sucent leur pouce ou leur doudou, (cf les travaux du Dr. Emmett Holt, The Care and Feeding of Children). Ils mouraient donc de ce qui était qualifié depuis le 19eme siècle de "marasme". Le Docteur bostonien Fritz Talbot rapporta d’un voyage en Allemagne la notion de "tender, loving care" après voir visité la clinique pour enfants de Düsseldorf. Il y vit avec stupéfaction une femme vieille et grassouillette portant sur sa hanche un bébé malingre, spectacle qui tranchait avec la propreté et la netteté des lieux.

Lorsqu’il demanda de qui il s’agissait, le Dr Arthur Schlossmann qui lui faisait visiter les dortoirs lui répondit : "Oh ça ? C’est la vieille Anna. Quand nous avons fait tout ce que nous pouvions sur le plan médical pour un bébé et que celui ci ne s’en tire toujours pas, nous le remettons à Anna, qui elle, réussit toujours." Il fallu pourtant attendre après la deuxième guerre mondiale pour que la nécessité de porter, caresser et dorloter les bébés avec tendresse soit adoptée comme principe dans les orphelinats et instituts d’adoption.

Sources : The Care and Feeding of Children - A catechism for the use of mothers and children's nurses. By L. Emmett Holt, m.d., ll.d. Professor of diseases of children in the college of physicians and surgeons (Columbia University) Attending physician to the babies' hospital and the foundling hospital, New York, Fourth edition, revised and enlarged New York and London  d. Appleton and company – 1907 Touching - The Human Significance of the Skin. By Ashley Montagu, Harpers & Row Publishers, New York 3rd edition, 1987